Les Buttes d’Amour de Vitré

Synthèse

Contexte

Le projet de réhabilitation des deux logements situés venelle des Buttes d’Amour à Vitré trouve son origine dans une opportunité saisie par la municipalité : requalifier un bien jusqu’alors occupé par le CCAS afin d’élargir l’offre de logements sociaux en coeur de ville.

Soucieuse de valoriser ce patrimoine tout en répondant aux enjeux d’habitat, la ville s’est tournée vers Aiguillon Construction, qu’elle a sollicité pour porter le projet en tant que maître d’ouvrage. Le bâtiment lui a été cédé, permettant ainsi de lancer une opération sur un bâti présentant des caractéristiques patrimoniales notables, peu communes dans les pratiques habituelles du bailleur social.

Objectifs prioritaires

  • Réhabiliter un bâtiment ancien datant du XVe siècle
  • Limiter l’articifialisation des sols
  • Garantir des conditions d’habitat durables
  • Renforcer la performance énergétique
  • Intégrer des matériaux biosourcés

Difficultés et enseignements

  • Accès aux bâtiments réhabilités délicat, nécessitant une autorisation d’emprise temporaire sur une parcelle voisine en contrebas. Dans un tel contexte, la densité urbaine n’est pas qu’une donnée d’ambiance : elle devient une composante structurelle du projet.
  • Des travaux correctifs ont été apportés l’année suivant la livraison. L’intervention, bien que légère, elle souligne l’exigence de suivi post-chantier sur un bâti ancien complexe, et l’importance d’un repérage fin des interactions avec les bâtiments voisins, souvent non maîtrisés dans ce type d’environnement dense.

Facteurs de réussite

  • Respect des normes historiques de Vitré et validée par l’ABF : l’inscription du site de projet au sein du PSMV a structuré la méthodologie du projet : chaque ajustement de détail, chaque évolution du chantier, ont été validés selon les contraintes patrimoniales, en garantissant une intervention exemplaire — à la fois conforme aux exigences de conservation historique et innovante dans l’usage des matériaux biosourcés et des aménagements intérieurs.
  • Restauration respectueuse mais techniquement exigeante.
  • Utilisation d’une palette large et cohérente de matériaux biosourcés : cette approche globale renforce la cohérence de l’enveloppe en favorisant l’harmonie entre technique, patrimoine et écologie.
  • Baisse de 74% des émissions de GES grâce à la mise en oeuvre de l’isolation performante de l’enveloppe, le traitement des dépertitions, des systèmes sobres et une électricité peu carbonée.

Territoire et site

Insertion urbaine

Le projet s’inscrit dans un tissu urbain dense et patrimonial, au coeur du centre ancien de Vitré, où les constructions médiévales forment un maillage serré de ruelles, de cours intérieures et de parcelles étroites.

La venelle des Buttes d’Amour, où se situe l’opération, illustre cette organisation typique : les bâtiments s’y imbriquent selon des logiques historiques, avec peu de foncier disponible et parfois aucun accès direct à la voie publique. Dans ce contexte, la réhabilitation du bâti existant prend tout son sens, avec un travail d’adaptation précis et respectueux.

Les venelles forment ici un réseau piéton essentiel, à la fois structurant pour le quartier et contraignant pour le chantier. Bien qu’elles soient parfois privées, elles assurent une continuité entre les îlots et constituent parfois le seul point d’accès aux logements anciens. Le projet se glisse dans cette trame discrète, où chaque déplacement d’engin, chaque livraison de matériaux, doit être anticipé.

Buttes d'amour - Extrait Cadastral
Extrait Cadastral

Description

Le projet

La réhabilitation s’est appuyée sur une lecture attentive du bâti existant, mêlant respect patrimonial, recherche de confort et sobriété technique. Dans un bâtiment ancien à structure mixte pierre et pan de bois, il ne s’agissait pas simplement de remettre à neuf, mais de composer avec la matière, ses irrégularités, ses désordres, et ses potentialités.

L’objectif : obtenir des logements de qualité, lumineux, éco-performants et économes, tout en maintenant l’âme du lieu.

La stratégie s’est structurée autour de trois grands volets : mise hors d’eau/hors d’air, amélioration thermique, et mise en place d’équipements techniques performants.

Travaux réalisés

  • Gros oeuvre et clos couvert : la première phase d’intervention a consisté à stabiliser et sécuriser l’enveloppe bâtie, fortement dégradée par le temps et inadaptée aux usages actuels.
  • Isolation thermique : le confort thermique a été recherché sans jamais sacrifier la respirabilité des parois ni trahir l’esprit des matériaux d’origine. Les solutions ont été choisies selon les orientations, la nature des murs, les possibilités d’intervention (intérieure exclusivement), et les exigences de conservation du bâti.
  • Équipements techniques : refonte intégrale des réseaux fluides, du chauffage et de la ventilation.
  • Finitions extérieures : soin particulier pour conjuguer esthétique, durabilité et cohérence avec l’esprit du bâti.

Énergie / Climat

Performance visées / atteintes

Les travaux engagés sur le bâtiment des Buttes d’Amour permettent un saut énergétique majeur, tant en termes de consommation que d’émissions.

Le projet ne visait pas un label BBC ou équivalent, mais une amélioration mesurable et durable du confort thermique, une réduction forte des charges pour les locataires, et un positionnement cohérent avec les ambitions environnementales d’un bailleur social.

Grâce à une isolation continue, une ventilation hygroréglable et des systèmes simples mais efficaces, la consommation théorique passe de plus de 700 kWhEP/m²/an à moins de 190 kWhEP/m².an, soit une baisse de plus de 70 %.

Côté confort, les matériaux à forte inertie (laine de bois, chaux-chanvre, dalle chaux) permettent un maintien stable de la température intérieure, été comme hiver. Le Tic projeté de 24,8°C confirme la capacité du bâtiment à éviter la surchauffe estivale, malgré l’absence de climatisation.

La consommation réelle mesurée sur le logement triplex (95 m²) corrobore les simulations : 7 917 kWh/an, soit 83 kWhEP/m²/an, pour l’ensemble des usages (chauffage, ECS, ventilation, éclairage, électroménager). Ce chiffre place le logement dans une dynamique sobre, très au-dessus des attentes sur bâti ancien.

Usages et appropriation

Charme, singularité… et quotidien

Un an après leur livraison, les logements réhabilités de la venelle des Buttes d’Amour trouvent peu à peu leur rythme d’occupation. Si le projet suscite l’intérêt par son caractère patrimonial fort, il interroge aussi les usages et les attentes actuelles en matière de logement social. Malgré la qualité perçue, la mise en location a été plus longue que sur des logements récents plus “standards”. Les locataires actuels apprécient l’esthétique et la qualité de finition, mais les attentes ont évolué.

Une réparation en cours de parcours

L’année suivant la livraison a été marquée par un désordre technique survenu sur un mur pignon, isolé en chaux-chanvre. Une infiltration d’eau a été constatée à l’interface entre le bâtiment et une construction mitoyenne hors propriété et des travaux correctifs ont été engagés pour sécuriser la situation. Cette intervention légère souligne l’exigence de suivi post-chantier sur un bâti ancien complexe.

Un projet collectif mené à terme

Cette dynamique partenariale entre la maîtrise d’ouvrage et la maîtrise d’oeuvre, attentive à la matière existante, aux usages et à la faisabilité réelle, a permis de livrer une opération à la fois discrète, ancrée et reproductible — une réponse fine aux défis de l’habitat durable en centre ancien.